Les lendemains étoilés
Bougeons les lignes donne rendez-vous à tous les Colmariennes et Colmariens, et plus largement, à tous les citoyens européens, sur notre blog, afin d’échanger sur l’Europe, de s’y renseigner, d’y trouver des pistes de réflexion.
Démocratie européenne, nouvelles technologies, éducation, jeunesse, environnement, économie, protection civile, aide humanitaire, défense… Florian Brunner, notre « benjamin », vous invite à y croire. Bougeons les lignes, au-delà des frontières !
Et vous, comment bougerez-vous les lignes?
par Florian Brunner, secrétaire de l’association « Bougeons les lignes ! »
De grandes personnalités ont porté le dessein européen tels Hugo, Briand, Stresemann, Monnet, Schuman, Adenauer, De Gaulle, Churchill, Giscard d’Estaing, Schmitt, Mitterrand, Kohl et Delors. L’action de ces hommes a été décisive mais quasi solitaire ; les citoyens n’y étant que très peu associés, observant de loin ces connaisseurs entreprendre leurs savantes opérations. Les grands desseins ne sont pas le monopole des grands hommes. Il ne faut pas faire l’Europe des grands hommes mais l’Europe des hommes. Une Europe des hommes, unis dans leur diversité, voilà le défi que nous, Européens, devons relever. Ce défi sera humaniste. L’humanisme, c’est remettre l’homme là où il a été oublié.
Une démocratie transnationale pourrait être instaurée. A chaque grande réforme européenne serait effectué un référendum européen c’est à dire une consultation s’adressant à tous les européens dans le même temps. La possibilité d’effectuer un référendum d’initiative populaire à l’échelle européenne deviendrait une habitude, encourageant la constitution de collectifs de citoyens européens. Dans cet esprit, la société civile doit pouvoir accéder au statut légal d’association européenne.
Les outils Internet doivent être mieux utilisés pour permettre l’expression du citoyen. Des débats publics pourraient être organisés, dans chaque Etat membre, sur des domaines qui les préoccupent et auxquels l’Europe peut apporter une réponse. Enfin si le Traité de Lisbonne est adopté, un véritable pouvoir législatif serait établi, le Parlement mériterait enfin son nom. Cette orientation devrait être poursuivie en faisant élire le Président de la Commission européenne par le Parlement européen. Ainsi les élections européennes permettraient à des partis politiques paneuropéens de présenter chacun un candidat pour la présidence et de porter un programme législatif dans tous les Etats membres. Les élections Européennes cesseraient d’être l’instrument d’intérêts politiques nationaux et permettraient l’essor de véritables projets européens. En outre, en étant élu au suffrage universel indirect, le Président de la Commission verrait sa légitimité renforcée et deviendrait le chef de l’exécutif politique européen. Celui-ci ne pourrait pas exercer plus de deux mandats. Le Président de la Commission élu formerait son équipe qu’il présenterait devant le Conseil et le Parlement européen pour approbation.
Il s’agit aujourd’hui de renforcer les passerelles entre les peuples afin que les citoyens européens apprennent à se connaître, formant peu à peu une véritable communauté.
Il s’agit d’accroître les échanges d’étudiants et les projets accordés aux jeunes, de ne plus rester dans la satisfaction de quelques déclarations de principes mais de les mettre en œuvre, leur donner force. Une cohésion pourra aussi s’accomplir dans le domaine de l’éducation, au-delà des projets de rapprochement évoqués auparavant. L’éducation européenne ainsi fondée devra permettre aux personnalités de se forger et d’évoluer, susciter l’épanouissement des êtres et non exacerber l’esprit de compétition qui a déjà fait tant de mal. Sur la base du livre franco-allemand d’histoire pourrait être créé un livre d’histoire européen, sans nier la diversité des programmes mais en apportant une vision d’ensemble. Un malaise de la jeunesse s’est développé en Europe. A force de ne plus porter son regard sur la jeunesse d’une société, on oublie qu’elle est pourtant l’avenir de celle-ci, elle se révolte alors, fait entendre sa voix. L’action des Etats est alors dispersée, les difficultés sont pourtant communes. Des passerelles doivent être établies entre le monde du travail et le système éducatif à un niveau européen. Des programmes existent mais doivent être renforcés. Faisons participer les citoyens et notamment les jeunes européens à ce chantier crucial.
Alors que les dérives de notre économie ont causé une crise majeure, l’Europe peut initier une rénovation. Cette économie virtuelle aux mains d’êtres prisonniers du court terme, ce système où ce n’est pas l’économie qui sert les hommes mais les hommes qui y sont assujettis doit s’achever. Les Etats doivent revoir leur gouvernance économique, il ne faut plus un Etat qui subit mais un Etat qui agit, il faut un Etat-entrepreneur. Un système de double répartition capital/bénéfices pourrait être développé. Le capital des entreprises dites stratégiques, que ce soit au plan local ou national serait partagé entre les acteurs essentiels de l’entreprise et l’Etat. Cela se répercutera au conseil d’administration, instance dirigeante de l’entreprise. Sa composition s’effectuerait de cette manière : ¼ pour l’Etat, ¼ pour le salariat, ½ moins une voix pour les actionnaires privés dans un premier temps, puis dans un second temps 1/3 pour l’Etat, 1/3 pour le salariat, 1/3 pour les actionnaires privés. Un salaire maximum pourrait être instauré en fonction du niveau de vie de chaque pays pour tous les emplois à forte rémunération, que ce soit pour les patrons, les sportifs ou les artistes.
Les Etats doivent cesser de faire passer leurs intérêts avant les valeurs fondamentales. Ces valeurs sont le respect des vies humaines, de la liberté des êtres et de leur diversité, dans un esprit solidaire, citoyen et juste. Une force d’intervention humanitaire européenne pourrait être structurée ainsi qu’une défense européenne qui consisterait en une alliance militaire des états membres avec une coordination transnationale. Avec le Traité de Lisbonne, de nouvelles dispositions sur la protection civile, l’aide humanitaire et la santé publique viseraient à renforcer la capacité de l’Union à faire face aux menaces pesant sur la sécurité des citoyens européens. En outre le Traité de Lisbonne permettrait à l’Europe de se faire clairement entendre auprès de ses partenaires mondiaux notamment par la nomination d’un haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, qui serait également Vice-président de la Commission et s’appuierait sur un nouveau service européen pour l’action extérieur.
Ainsi l’Union européenne a la volonté d’exister sur la scène internationale. Mais pour exister, l’Europe doit être réellement indépendante, elle se doit donc d’avoir une défense indépendante. Elle serait alors maîtresse de ses forces, qu’elle pourrait employer selon sa seule volonté. En terme de budget, la défense européenne ne coûterait pas plus cher pour les Etats membres que ce que leur coûte actuellement leur défense nationale. Le retour de la France au sein du commandement intégré de l’OTAN semble freiner ce projet. En retour de cet alignement, la France n’a demandé aucune garantie et n’est donc assurée de rien. En intégrant l’OTAN, la France pense pouvoir européaniser l’Alliance atlantique et faire avancer par ce biais la politique européenne en matière de défense. Pari risqué, une « braderie » d’après Hubert Védrine, ancien ministre des affaires étrangères françaises. Et en effet, malgré la rhétorique officielle du Président des Etats-Unis, il paraît chimérique de croire qu’un véritable partage des compétences pourra s’effectuer, le rapport de forces ne jouant en aucun point en faveur de l’Europe.
Née à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, l’OTAN avait pour mission première de contenir toute expansion du bloc soviétique notamment en Europe. Fortement marquée par la prédominance des Etats-Unis, l’alliance a rempli son rôle en évitant tout dérapage majeur au cours du demi-siècle passé. En élargissant son champ d’action et la zone géographique de ses interventions, en reconnaissant le statut particulier de l’ONU, elle est devenue la source d’interrogations nombreuses allant jusqu’à remettre en cause son existence. L’Europe se doit de clarifier sa position : contre poids de l’alliance, pilier européen de l’alliance ou troisième puissance entre les antagonistes d’hier ? La réponse découlera de la volonté des européens d’assumer un rôle autonome dans l’équilibre mondial, d’assumer leur part du fardeau et de conserver ou non leur identité en se dotant des moyens indispensables.
L’armement nucléaire et la liberté de choix dans sa mise en œuvre mériteront une étude particulière et approfondie tant les situations et les intérêts sont divers. Associons les citoyens européens à cette réflexion et ayons le courage de prendre notre sort en main.
Le vingt et unième siècle peut ouvrir l’ère de l’humanisme, après une multitude de révolutions technologiques qui ont fait rêver les hommes mais n’ont pas apporté à elles seules le bonheur espéré, nous avons compris que le progrès sans humanisme n’est pas un progrès. Cette esquisse d’un avenir européen peut paraître inaccessible, et il en sera toujours ainsi tant que nous resterons figés dans nos craintes, tant que nous cèderons à la facilité de ne plus croire, tant que nous laisserons à d’autres ces combats difficiles qu’ils ont, eux même, lassés, cessé de mener. Lorsque nous ne sommes plus habités de passions, nous n’habitons plus notre existence, en abandonnant nos rêves, nous abandonnons notre destinée. Notre nation a perdu de son éclat, qu’elle retrouve son ardeur dans la construction d’un destin, celui des européens car comme le disait Victor Hugo, toutes nos passions reflètent les étoiles.